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Fred . B

08-12-2004

Auteur : F.B


'Le soleil devrait être plus humble que la lune : il est en effet plus simple d'éclairer le jour que la nuit'.
Cette citation extraite du livre 'Dieu et nous seuls pouvons' de Michel Folco - non, je ne recherche pas mes références dans le divin. Ce livre, un peu fable, un peu roman historique narre l'histoire du fondateur malgré lui d'une dynastie de bourreaux, dont la devise est, ou pourrait être 'Dieu et nous seuls pouvons'. A méditer, peut être un prochain sujet de planche...- cette citation donc me semble illustrer et représenter le mieux le petit travail que je voudrais partager avec vous ce soir, ou du moins vous soumettre. La Lumière n'est pas toujours là où l'évidence, la croyance populaire, ou plus simplement, les habitudes voudraient qu'elle soit.

L'humilité, terme presque désuet tant il est peu employé, revient en Maçonnerie comme un leitmotiv : l'humilité de l'Apprenti, l'humilité du Compagnon - mais c'est plus rare -, humilité rappelée et parfois assénée par des Maîtres Maçons, qui sont bien sûr des modèles d'humilité..., tout ceci dans un contexte où à chaque tenue nous rappelons notre volonté d'améliorer à la fois l'Homme et la Société, où nous affirmons comme principe fondamental le respect des autres et de soi même. Réclamer de l'autre de l'humilité ne me semble pas aller dans le sens de son développement, du respect de lui même.
J'ai pour ma part l'impression que demander à l'autre de l'humilité - dans le contexte maçonnique -, c'est chercher à se protéger soi même, en créant une barrière psychologique que le tablier blanc représenterait, c'est transférer sur l'autre la modestie que l'on n'assumerait pas toujours, c'est créer ou entretenir une relation de dominant à dominé dont la finalité initiatique m'échappe.

Humilité : 'état d'esprit, attitude de quelqu'un qui est humble, se considère sans indulgence, est porté à rabaisser ses propres mérites'.
Il me semble, au vu de cette définition lexicographique, que nous pouvons parler d'humilité franche et sincère à travers le 'Etes vous Franc Maçon ? Mes Frères me reconnaissent comme tel'. Au travers de cette interrogation réponse qui nous est rappelée à chaque ouverture des travaux, se trouve résumé ou du moins représenté au mieux l'esprit qui doit animer un Fo°oMo°o, c’est à dire la reconnaissance de soi à travers l'autre, l'affirmation de l'existence de l'autre. N'oublions pas que la lumière n'existe que dans le reflet que lui procurent les obstacles : on ne voit l'autre que parce qu'il nous renvoie la lumière se son image ; de là à dire que l'autre, a priori obstacle, peut devenir Lumière, il n'y a qu'un pas, que je franchis allégrement.

On pourrait aussi voir dans le 'Etes-vous Franc Maçon ? Mes Frères me reconnaissent comme tel', au premier abord, la négation de soi, une demande d'humilité faite humiliation. Par humiliation j'entends une certaine obligation de se renier, comme s'il nous était demandé de ne pas se reconnaître et affirmer tel que l'on est, d'occulter un des outils de construction personnelle qu'est la Maçonnerie ; humiliation que pourrait ressentir plus encore le jeune Apprenti qui ne réaliserait pas la portée symbolique et constructrice du silence qu'on lui impose, le confort du silence dont on a pourtant tant de peine à sortir lorsque l'on devient Compagnon.

Heureusement, le livre d'Apprenti, que personne n'a oublié, ni dans la lettre ni dans l'esprit, nous rassure sur la considération que nous porte l'institution maçonnique : 'La Fo°oMo°o, adversaire du mensonge, où qu'il se cache, cherche en toute chose comme en tout être, sous des apparences parfois trompeuses, la Vérité'. Un peu plus loin : 'Le Fo°oMo°o doit être bon, juste, digne, dévoué, courageux, exempt d'orgueil et d'ambition, affranchi de tout préjugé et de toute servitude'. Nous voilà rassurés.
Ne tombons pas cependant dans un excès inverse, qui pourrait nous inciter à nous considérer comme une élite, pire encore l'Elite ! N'oublions pas que la Fo°oMo°o se décompose en deux temps :
? Les tenues, microcosme d'une micro société, hors du temps, petit havre de sérénité, dépassionné. Mais ce temps est très limité ; hélas pensent certains, heureusement pensent d'autres dont je suis, car la vie n'est pas là ; la Fo°oMo°o n'est pas une vie, mais un des outils pour la Vie.
? Le reste du temps, hors tenue, lorsque nous nous retrouvons dans le monde profane, avec nous mêmes. Nous y rencontrons aussi des gens de valeur, que l'on ne peut suspecter d'être tous des francs maçons : ça se saurait !
J'aurais pu parler de 3 temps plutôt que 2, ça se fait souvent. J'aurais pu parler du temps d'avant qu'on soit Maçon, mais là n'est pas le propos de ce soir.

Nous ne sommes donc pas une élite, l'affaire est entendue.

Cependant, du complexe d'infériorité que ma condition d'Apprenti a ou aurait pu contribuer à développer ou accentuer, la barrière qui me sépare du complexe de supériorité n'est ni loin, ni haute. Et hélas, Maître Maçon je suis et serai, et mon grade ne m'offre pas beaucoup de garde-fous : plus d'instruction, ce que je déplore encore et toujours, plus d'obligation effective de travail, ce travail que pourtant nous affirmons vénérer. Et aussi courageux, dévoués, dignes, etc soyons-nous, convaincus du bien fondé de la reconnaissance du travail, nous savons tous qu'il est plus facile de parler du travail des autres, que de se mettre devant la planche à tracer. Je vous parle de moi, moi qui dois me botter le train pour me répéter que si modeste soit ma contribution, je ne peux pas, je dirais même que je n'ai pas le droit de profiter uniquement de l'inconfort des chaises en bois, à prendre ce que vous me donnez par vos travaux ou interventions, sans m'employer à vous donner un peu de moi. L'auberge espagnole, image que nous associons bien souvent à le Franc Maçonnerie, et plus particulièrement à sa vie dans le temple, ne peut fonctionner, s'enrichir dans le temps, si tout le monde n'apporte pas sa contribution, aussi médiocre croyions-nous définir et apprécier sa finition. La pierre polie n'est pas une émantion divine, elle est toujours le fruit du travail d'une pierre brute, ou que l'on croyait inachevée.
J'ai une pensée toute particulière en écrivant ça pour notre Fo°o Arthur, trop vite passé à l'Orient Eternel. J'ai partagé avec lui le banc d'Apprenti, puis le banc de Compagnon, lui qui se perdait, se gâchait dans son complexe d'infériorité, ce complexe du non diplôme. Combien de fois, combien de FFo°o lui ont répété qu'il était porteur de sa valeur, de sa richesse, et qu'il nous en privait par sa retenue.

Que ceux qui pourraient penser que leurs travaux seraient inintéressants, et à ce titre -pensent-ils au moins - n'osent pas en produire, se souviennent de la médiocrité de ce travail, pour se dire 3 choses :
? primo, il sera facile de faire aussi bien
? deuxio, on fait un travail pour soi avant tout, et de son achèvement et de ce que l'on aura mis de soi à l'intérieur, découlera que ce travail est pour les autres, devient un peu le leur
? tersio enfin, et j'espère que personne ne me démentira ce soir, qu'à quelque degré que soit perçu, apprécié, écouté ou entendu un travail, que l'on se soit un peu ennuyé -ça arrive parfois, n'est-ce pas - ou régalé, personne n'a jamais vilipendé ou honni l'auteur du travail... ou alors pas souvent !

Le paraître n'a pas lieu ici, ne trouve pas sa place. Travailler sur soi, rechercher la Vérité, c'est développer l'Etre, le Vrai, par opposition au Paraître. Le microcosme que contribue à créer le rituel est sans fard, et c'est la toute la force de la Maçonnerie. Laisser ses métaux hors du temple n'est pas un vain mot, et qui oublierait de les y laisser serait vite démasqué, et resterait à très court terme, le seul à croire être ce qu'il voudrait paraître.

La modestie, voilà je crois l'approche que je préfère à l'humilité.

Modestie : 'Qualité qui éloigne de penser à soi, ou de parler de soi avec orgueil' nous dit le dictionnaire.
La modestie, c'est pour moi ne pas chercher à abreuver l'autre de son savoir, c'est voir l'autre comme son égal ; c'est le savoir écouter, qualité ô combien complexe à acquérir, savoir écouter qui lorsqu'il est accompli pourra devenir le savoir parler ; la modestie, c'est 'savoir dire sans écraser', alors que l'humilité me semble plutôt relever du 'ne pas dire pour ne pas écraser'. La différence est fondamentale entre une approche positive, respectueuse de l'autre dans son intégrité -la modestie-, et l'approche négative, réductrice de soi - l'humilité -.
L'humilité implique, ou découle le plus souvent, d'une relation de dominant à dominé, une forme d'asservissement intellectuel. Et si le dominant sort en général indemne de cette relation, il n'en est pas toujours de même du 'dominé', qui s'il arrive à sortir de ce statut, ce dont je n'ose pas douter en Maçonnerie, en gardera peut être quelques vagues cicatrices, voire des rancoeurs.

A la modestie, on associe la simplicité, au sens intellectuel du terme, considérée à juste titre comme une qualité.
A l'humilité on associe bien souvent le 'peu de bien', et la dérive par association d'idée, et hélas souvent par stéréotype social, la dérive donc est très rapide pour aller du peu de bien matériel au peu de bien intellectuel. 'La dèche lui donne plein d'humilité' écrit la comtesse. L'humilité s'exprime très souvent chez l'humble, au sens littéraire du terme, c'est à dire à l'homme de condition sociale modeste, à travers un sentiment plus ou moins diffus de culpabilité, comme pour s'excuser d'être là, de respirer le même air que nous. Et ça, c'est injuste, insupportable.

Alors mes FFo°o, efforçons-nous d'appliquer à nous mêmes la modestie, travaillons sur nous, plutôt que de demander de l'humilité à l'autre.
Si la forme de ce travail vous donne une impression de donneur de leçons, voyez-y plus plutôt une maladresse dans le dit et l'écrit, percevez-y surtout ma conviction profonde, une exhortation pour moi ; c'est un peu aussi vous demander de me rappeler ces propos, lorsque j'oublie de me les appliquer.

J'ai dit